Conte Fantastique

par Alexandra FAU

“Les dessins, peintures et installations de « Conte fantastique » (du 2 juin au 2 juillet 2007, galerie Iragui) entraînent le spectateur dans une rêverie éveillée faite d’obsessions et de fantasmes. Des images d’adolescents au style « gothique », des jeunes filles au rimmel dégoulinant sur fond de décor pop rock, des égéries figées dans des cadres dix-neuvièmistes peuplent le décor à l’obscurantisme moyenâgeux. La série des Parchemins suggère même quelques cérémonies initiatiques durant lesquelles l’artiste Florence Obrecht aurait fait affleurer le dessin à la surface du papier à l’aide d’une bougie. L’évanescence de la matière picturale à peine rehaussée de gouache incarne en soi l’image d’une vanité moderne mêlant l’éphémère à toutes ces choses dédiées au plaisir de l’humain.

Quelle tentation, en effet, pour n’importe quel individu doué d’un tant soit peu de sensibilité romanesque de se livrer, avec la jubilation du double jeu, aux morbides mascarades auxquelles nous convie l’artiste !

Avec son Ophélie, hommage implicite à celle de Sir John Everett Millais peinte en 1851, Florence Obrecht renoue à la fois avec la quête de la fin du 19ème siècle d’un idéalisme romantique et la tradition du portrait mortuaire. Dans son écrin feutré, l’image préraphaélite, icône de la beauté et de la simplicité originelle, apparaît toute scintillante, telle une offrande sur l’autel du sacrifice. La relation exclusive et fétichiste qui unit le spectateur à l’ ?uvre transforme le regard et convie à une reconsidération de l’héritage du canon dans la peinture occidentale. Dans ses précédentes toiles « Figures devant une grille », l’artiste rompait déjà avec la conception classique pour nous offrir, selon ses propres termes, « des jeunes filles qui répondent aux canons de la beauté actuelle sans ironie ». Eléonore est l’une d’elle. Peint à larges coups de brosse dans une matière aux couleurs chaudes et sensuelles, le portrait trahit un sentiment troublant d’après-fête qui aurait mal tournée.
D’une certaine manière, Florence Obrecht développe des contre-narrations en réponse aux excès économiques, aux promesses technologiques non tenues, aux problèmes de communication entre les individus. De cette anxiété naît un état d’extrême violence qui peut conduire à reconsidérer les forces surnaturelles comme ultime refuge.”